Le Coeur et la mémoire de Willy Staquet

Le cœur et la mémoire de Willy staquet

Tous les téléspectateurs d’âge plus ou moins canonique connaissent Willy Staquet

Pour l’avoir vu se produire à la télé dans « Chansons à la carte » notament, avec l’orchestre d’Henri Segers.

Le talent de cet accordéoniste était tel que, malgré les exigences commerciales de certains producteurs, il parvenait toujours à tirer son épingle du jeu.

Non seulement instrumentiste, mais également compositeur, Willy Staquet avait eu à cœur de placer la barre au plus haut : là où évoluait le Lessinois Gus Viseur, le caïd du piano à bretelles, celui-là même qui dépoussiéra le « musette » en inaugurant le style de la valse « swing », et influença ainsi, de Tony Murena à Marcel Azzola, tous les accordéonistes à l’âme bien située.

Les plages que Willy enregistra avec Benny Couroyer ( au saxe-ténor) témoignent de cette filiation dans le toucher aristocratique de l’instrument et l’envol de l’improvisation. Chez l’un comme chez l’autre, le palpitant était seul habilité à donner des ordres : le clavier obéissait.

Entendre Willy Staquet évoquer Gus Viseur – qui était devenu son ami – constitue à la fois un régal et une leçon de modestie.

Ce qu’on sait moins, c’est qu’avant de se collecter avec le soufflet à punaises, Willy, les humeurs de l’adolescence à peine dégorgées ( donc dès avant l’an 40 ), avait tenu glorieusement la batterie chez les « Dixie Stompers », ces pionniers montois du jazz, où se prodiguait, à la trompette, Fernand Demoustier, qui mourut en camp de concentration en 1943 et qui a laissé sous le nom de F. Dumont un souvenir incondescent chez les surréalistes, particulièrement en Hainaut où il fut le complice d’Achille Chavée.

A près de 80 berges, alors que ses articulations se refusent à caresser le biniou, Willy poursuit, sous une autre forme, ses dévotions musicales. Il faut l’entendre raconter les faits et gestes des cadors de l’époque. Avec quelle truculence mêlée d’admiration il met en scène la première intrusion à Mons de Django Reinhardt, le grand Rabouin de la guitare, qui accommoda le jazz à la sauce tzigane !

Bien avant l’ère de l’informatique, Willy Staquet a mis sur fiches et consigné dans ses archives des tas d’informations à propos du monde musical de l’entre-deux-guerres, de l’occupation, de la libération et de la suite.

Sa mémoire a tout retenu de ce qui valait de l’être.

Elle ne cesse de vous interloquer. Il ne demande qu’à le faire …

Ce musicien de première bourre entretient ainsi les rouages de la machine à remonter le temps.

Merci l’Artiste !

Ecrit par André Tillieu Ecrivain

Extrait du magazine SABAM

Author: asbl SPTJA